1. Quel est le régime linguistique officiel en vigueur dans la Région de Bruxelles-Capitale et ses alentours ?

La Région de Bruxelles-Capitale et ses dix-neuf communes sont officiellement bilingues, ce qui signifie que le néerlandais et le français y bénéficient du statut de langues officielles. Dans ces communes, tous les documents officiels, les déclarations publiques, les noms des rues et les panneaux routiers doivent être bilingues. Les administrations communales s’adressent aux citoyens bruxellois en français ou en néerlandais, selon la langue que ceux-ci préfèrent. Dans l’enseignement obligatoire public ou subventionné, tant au niveau primaire que secondaire, les cours doivent être dispensés soit en français, soit en néerlandais. En revanche, les communes de Flandre et de Wallonie ne possèdent pour la plupart qu’une seule langue officielle, à savoir le néerlandais en Flandre et le français en Wallonie. Cette langue est utilisée aussi bien dans les relations officielles entre les citoyens et les autorités publiques que dans l’enseignement public ou subventionné. Toutefois, il existe des exceptions : parmi les communes wallonnes, neuf possèdent l’allemand comme langue officielle, deux bénéficient de « facilités linguistiques » en allemand et quatre de « facilités linguistiques » en néerlandais, tandis que douze communes flamandes, y compris six communes adjacentes à la Région de Bruxelles-Capitale, disposent de « facilités linguistiques » en français. Ces communes dites à facilités autorisent, de manière limitée, l’emploi d’une deuxième langue dans les domaines administratif et scolaire.

2. Quelles sont les langues maternelles de la population bruxelloise ?

Du Moyen Âge au 19ème siècle, la langue maternelle de la grande majorité des habitants du territoire actuel de la région bruxelloise a toujours été un dialecte néerlandais. Langue de la Cour du duc de Bourgogne, le français fut introduit au 15ème siècle et est resté la langue des élites bruxelloises tout au long des siècles suivants. La situation a changé après 1830, lorsque Bruxelles a été promue capitale d’un état francophone officiellement unilingue et que l’enseignement primaire est devenu accessible à un nombre croissant d’enfants. Ce changement a progressivement mené à la francisation de la population locale ainsi qu’à celle des immigrants flamands. Même après la reconnaissance du néerlandais en tant que seconde langue officielle de la Belgique en 1898, ce processus de francisation s’est poursuivi, avec pour conséquence que le français est graduellement devenu la langue maternelle d’une grande majorité de la population. Toutefois, au cours de ces dix dernières années, l’immigration massive provenant de pays européens et non-européens a provoqué une hausse spectaculaire de la diversité linguistique.

Les données fiables les plus récentes sont basées sur un échantillon représentatif constitué de plus de 2500 adultes domiciliés dans la région de Bruxelles-Capitale, qui ont été interrogés dans le cadre d’une enquête menée en 2017 pour le quatrième Taalbarometer de la Vrije Universiteit Brussel . Ces chiffres peuvent être comparés à des données similaires récoltées en 2000, 2006 et 2011, ainsi qu’à des données récoltées en 2018 dans le « Vlaamse Rand », soit les 19 communes du Brabant flamand entourant Bruxelles (y compris les six communes à facilités linguistiques) et totalisant environ 400.000 habitants.

Le tableau suivant indique les pourcentages des personnes interrogées qui mentionnent les diverses langues lorsqu’on leur demande quelles langues ils parlaient à la maison durant leur enfance, soit de manière exclusive, soit en combinaison avec d’autres.

Langue Maternelle 2001 2006 2011 2017 Rand 2018
FRANCAIS 71 76.4 63.2 73 37.4
NEERLANDAIS 19.3 15.6 19.6 16.3 55.9
ANGLAIS 2.9 2.3 2.5 2.6
ARABE 9.7 6.9 21.1 8.9
ESPAGNOL 2.5 2.9 3 3
ALLEMAND 1.6 1.8 0.9 2.2
ITALIEN 2.5 3.2 2.5 2.2
TURC 3.3 1.4 4.5 1.3

Source : Rudi Janssens, Meertaligheid als opdracht. Een analyse van de Brusselse taalsituatie op basis van taalbarometer 4, VUB Press, 2018, table 21 ; Rudi Janssens, De Rand vertaald. Een analyse van de taalsituatie op basis van taalbarometer 2 van de Vlaamse Rand, VUB Press, 2019, tableau 23 ; et Rudi Janssens, communication personnelle, pour les langues autres que le néerlandais et le français.

Près de 30% des Bruxellois (et davantage parmi les plus jeunes) disent avoir parlé plusieurs langues à la maison pendant leur enfance, par exemple le néerlandais, l’arabe ou le turc combiné avec le français 1. En 2017, 52.2 % des personnes interrogées disent avoir le français pour unique langue parlée à la maison dans l’enfance et 5.6% le néerlandais. Dans le Vlaamse Rand (2018), ces pourcentages sont de 20.4% pour le français et 45.0 pour le néerlandais2

1 R. Janssens, Meertaligheid als opdracht, VUB 2018, tableaux 22 et 23.
2 R. Janssens, De Rand vertaald, VUB Press, 2019, tableau 23

3. Quelles langues parlent les Bruxellois ?

Personne ne peut savoir avec certitude combien de langues sont parlées par les Bruxellois. Dans leurs échantillons d’environ 2500 personnes, les Taalbarometers en détectent plus de cent. Mais vu que plus de 180 pays ont des ressortissants à Bruxelles et que beaucoup de ces pays sont multilingues, le nombre de ces langues doit être encore bien plus élevé.

Le tableau suivant indique les pourcentages des adultes bruxellois qui disent parler bien ou très bien les principales langues parlées à Bruxelles et, à titre de comparaison, dans sa périphérie flamande, selon les données des quatre Taalbarometers bruxellois et celles du Taalbarometer 2018 pour le Vlaamse Rand1 :

Connaissance bonne ou très bonne
2001
FRANCAIS (FR) 95.5 95.6 88.5 87.1 79.6
NEERLANDAIS (NL) 33.3 28.3 23.1 16.3 68.5
ANGLAIS (EN) 33.3 35.4 29.7 34.4 50.0
ARABE 10.1 6.6 17.9 9.1 4.6
ESPAGNOL 6.9 7.4 8.9 4.9 11.7
ALLEMAND 7.1 5.6 7.0 3.2 19.1
ITALIEN 4.7 5.7 5.2 3.5 6.6
TURC 3.3 1.5 4.5 1.4 1.8
FR+NL 32.8 27.0 20.8 13.6 51.7
FR+NL+EN 16.4 15.1 11.6 6.2 33.2

Pour les différents niveaux de connaissance des trois langues principales, les Taalbarometers pour la région de Bruxelles-Capitale (2017) et (entre parenthèses) pour le Vlaamse Rand (2018) 2 donnent les pourcentages suivants :

FRANCAIS
Très bon connaissance 67.8 (55.1) 9.2 (56.5) 12.0 (19.7)
Bonne connaissance 19.3 (24.5) 7.1 (12.0) 22.4 (30.3)
Se débrouille 12.0 (15.0) 20.3 (15.4) 26.0 (24.6)
Connait quelques mots 0.7 (4.1) 43.0 (10.9) 18.7 (12.4)
Connaissance nulle 0.1 (1.3) 20.5 (5.1) 20.8 (13.1)

À la lumière de ces chiffres, on peut dire que, s’il y a en Belgique un territoire bilingue français-néerlandais, c’est le Vlaamse Rand (51.7%) et non Bruxelles-Capitale (13.6%). Le déclin rapide de la bonne connaissance des deux langues officielles à Bruxelles depuis 2000 n’est que partiellement compensé par la légère progression de la troisième « langue-lien », l’anglais. En 2017, 7.6% de la population bruxelloise dit ne pouvoir bien parler ni le français, ni le néerlandais, ni l’anglais, contre seulement 3% en 2000. Cette évolution s’explique principalement par la diversité et la fluidité croissantes de la population bruxelloise. Entre 2000 et 2017, celle-ci est passée d’environ 950.000 à environ 1.200.000 unités. Au cours de la même période, environ 1.200.000 personnes se sont installées à Bruxelles, la plupart (800.000) en provenance de l’étranger, et environ 1.100.000 l’ont quittée, la plupart (600.000) à destination du reste de la Belgique. Le déclin du pourcentage de Bruxellois parlant bien ou très bien le français et/ou le néerlandais n’exclut donc pas que d’innombrables personnes aient, durant leur séjour à Bruxelles, considérablement amélioré leur connaissance du français et du néerlandais.

1 R. Janssens, Meertaligheid als opdracht, VUB Press,, 2018, tableau 4 ; De Rand Vertaald, VUB Press, 2019, tableau 8.
2 R. Janssens, De Rand vertaald, VUB Press, 2019, tableau 6.

4. Quelle place occupent les langues dans le programme scolaire des écoles francophones bruxelloises ?

Dans les écoles publiques et subventionnées de la Région de Bruxelles-Capitale, les cycles primaire et secondaire durent chacun six ans. Ces écoles dépendent soit de la Communauté française (la Fédération Wallonie-Bruxelles, dont relèvent 76 % des élèves bruxellois et pratiquement tous les élèves wallons), soit de la Communauté flamande (la Vlaamse Gemeenschap, dont relèvent 18 % des élèves bruxellois et tous les élèves de Flandre), les 6% restant fréquentant les écoles européennes ou des écoles internationales privées. En vertu d’une loi nationale qui date de 1963, l’enseignement de la seconde langue nationale est obligatoire, aussi bien en primaire qu’en secondaire, dans toutes les écoles des deux Communautés situées dans la Région de Bruxelles-Capitale ou dans les communes limitrophes à facilités linguistiques.

En ce qui concerne l’enseignement francophone, il faut distinguer la situation présente de la situation qui sera graduellement mise en place — à partir de 2021 pour le primaire, à partir de 2026 pour le secondaire — suite à la réforme adoptée en avril 2019 sous le nom de « Pacte d’Excellence ». Dans les écoles primaires francophones de Bruxelles, le néerlandais est actuellement supposé être dispensé à raison de trois heures par semaine en troisième et quatrième années et à raison de cinq heures par semaine en cinquième et sixième années. Dans les écoles primaires francophones de Wallonie, la deuxième langue peut être le néerlandais, l’anglais ou l’allemand, et est actuellement enseignée à raison de deux heures par semaine en cinquième et sixième années. Le Pacte d’excellence ne modifiera pas le volume horaire à Bruxelles, mais introduira la deuxième langue en troisième et quatrième primaires en Wallonie, à raison de deux heures par semaine. L’examen final de l’enseignement primaire (le Certificat d’Études de Base ou C.E.B.) ne tient compte, ni en Wallonie ni à Bruxelles, de l’apprentissage de la deuxième langue.

Pendant les deux premières années de l’enseignement secondaire francophone à Bruxelles, tous les élèves suivent actuellement quatre heures de néerlandais par semaine, et quatre heures d’anglais ou de néerlandais dans les écoles wallonnes. À partir de la troisième année, il y a une grande différence entre les cursus — général, technique ou professionnel. Avec la mise en place du Pacte d’excellence, le tronc commun est allongé de deux à trois ans. En première année, il y a quatre heures de deuxième langue, la même qu’en primaire, donc nécessairement le néerlandais à Bruxelles. En deuxième et troisième, la deuxième langue passe de quatre à trois heures et une troisième langue moderne est ajoutée — à Bruxelles , l’anglais — également à raison de trois heures par semaine, ainsi que le latin, à raison de deux heures par semaine. Pour les trois dernières années du secondaire, les élèves se répartiront entre l’enseignement de transition (vers l’enseignement supérieur) ou l’enseignement de qualification (anciennement « professionnel »). Dans certaines écoles et certaines sections de transition, il y aura, comme aujourd’hui, la possibilité d’ajouter d’autres langues, qui peuvent inclure l’allemand, l’italien, l’espagnol, l’arabe ou le russe. Dans l’enseignement qualifiant, un effort sera fait pour introduire un enseignement des langues adapté à la spécificité de chaque métier et mettre fin à la situation présente, où bon nombre d’élèves sortant d’une section professionnelle n’ont eu aucun cours de langue au cours des quatre années qu’ils y ont passé.

D’après les chiffres du Taalbarometer 2017, 8% des Bruxellois de moins de trente ans issus de l’enseignement francophones bruxellois disent pouvoir parler le néerlandais bien ou très bien, alors qu’ils étaient encore 20% en 2000. Bien qu’il dise faire des langues une de ses priorités, le Pacte d’excellence a peu de chances de redresser ce chiffre. Le volume horaire en primaire est doublé en Wallonie mais reste inchangé à Bruxelles. La deuxième langue ne compte toujours pas dans le CEB et la difficulté de recruter des instituteurs compétents pour enseigner le néerlandais à Bruxelles sera encore accrue par le gonflement de l’enseignement des langues en Wallonie. En outre, pour les premières trois années du secondaire, alors que le latin est rendu obligatoire pour tous, le volume consacré au néerlandais diminuera (de quatre à trois heures en deuxième). Le peu d’enthousiasme affiché par la Communauté française pour favoriser et valoriser l’apprentissage du néerlandais à Bruxelles est parfois motivé par le souci de ne pas handicaper la scolarité d’élèves wallons arrivant à Bruxelles en cours d’études. Hélas, le doublement des heures de deuxième langue dans l’enseignement primaire wallon n’y changera pas grand chose, le choix étant laissé en Wallonie entre le néerlandais et l’anglais et une majorité choisissant l’anglais.

5. Quelle place occupent les langues dans le programme scolaire des écoles néerlandophones à Bruxelles ?

Dans les écoles primaires néerlandophones de Bruxelles, le français est obligatoire comme deuxième langue à partir de la troisième année (seulement à partir de la cinquième en Flandre), mais beaucoup d’écoles néerlandophones bruxelloises offrent déjà un enseignement du français dès la première année. À la fin de l’école primaire, les élèves doivent avoir atteint le niveau A1 du cadre de référence commun européen pour les langues.

Tous les élèves des écoles secondaires néerlandophones doivent apprendre au moins deux langues étrangères. Selon la section choisie, les élèves de première et deuxième année ont trois, quatre ou cinq heures de français par semaine. Ils ont également deux ou trois heures d’anglais (à partir de la première année dans l’enseignement officiel, à partir de la deuxième dans l’enseignement libre). À partir de la troisième année, et de nouveau en fonction de la section choisie, le français et l’anglais sont enseignés au moins deux heures par semaine, et, dans la plupart des cas, trois ou quatre heures par semaine. Une quatrième langue (outre le néerlandais, le français et l’anglais) peut être choisie en cinquième et sixième années dans certaines sections (par exemple langues modernes ou tourisme). Cette quatrième langue, enseignée une heure par semaine ou davantage, est généralement l’allemand ou l’espagnol.

Dans l’enseignement secondaire néerlandophone, environ 20% de l’horaire est normalement consacré à l’enseignement des langues. L’objectif est qu’en fin de secondaire les élèves atteignent le niveau B1 du cadre de référence européen tant pour le français que pour l’anglais.

D’après le Taalbarometer 2017 1, 69% des Bruxellois de moins de trente ans issus de l’enseignement néerlandophone bruxellois disent pouvoir parler le néerlandais bien ou très bien et 72% pour l’anglais. Ces chiffres signalent une détérioration sensible par rapport à 2000 (94% et 78%, respectivement), mais ils restent beaucoup plus élevés que les chiffres correspondants pour l’enseignement francophone bruxellois (8% pour le néerlandais et 41% pour l’anglais). L’objectif du trilinguisme généralisé est manifestement un objectif plus réaliste pour l’enseignement néerlandophone que pour l’enseignement francophone bruxellois, du moins si l’apprentissage du néerlandais n’y est pas drastiquement réformé.

1 R. Janssens, Meertaligheid als opdracht, VUB 2018, tableau 46.

6. Quelle place occupent les langues dans le programme scolaire des Écoles européennes à Bruxelles ?

Il existe actuellement quatre Écoles européennes permanentes à Bruxelles : Bruxelles I à Uccle, Bruxelles II à Woluwé, Bruxelles III à Ixelles et Bruxelles IV à Laeken. Il y a également une école temporaire à Forest (Berkendael). Un des objectifs des Écoles européennes est d’offrir un environnement multinational, multiculturel et multilingue à une population linguistiquement et culturellement diverse. Par conséquent, l’enseignement des langues joue un rôle primordial dans le programme scolaire des Écoles européennes.Tous les élèves de ces écoles apprennent au moins deux langues en plus de leur langue maternelle.

Après deux ans d’école maternelle (de 4 à 6 ans), l’enseignement dispensé par les écoles européennes se poursuit pendant cinq ans à l’école primaire (de 7 à 11 ans) et sept ans à l’école secondaire (de 12 à 18 ans). Actuellement, les 24 langues officielles de l’Union européenne sont enseignées en tant que première langue (L1).

Sections Linguistiques dans les Écoles Éuropéenes de Bruxelles - 2018/2019
School BU CZ DE DK EN EL ES ET FI FR HU IT LT LV NL PL PT RO SK SV Total
Bxl I x x x x x x x x 8
Bxl Berkendael x x x
Bxl II x x x x x x x x x 9
Bxl III x x x x x x x 7
Bxl IV x x x x x x x x 7
Total 1 1 4 1 4 1 2 1 1 5 1 3 1 1 3 1 1 1 1 1 35

Pour 17 de ces langues, il existe au moins une section linguistique distincte dans les Écoles européennes de Bruxelles. Chacune d’elles dispose de sections en anglais, en français et en allemand, tandis que les autres sections linguistiques sont réparties entre les écoles, comme indiqué dans le tableau. Les élèves dont la langue maternelle est une langue officielle de l’Union européenne qui n’a pas de section linguistique propre (le croate, l’estonien, le lituanien, le slovaque, le slovène) peuvent intégrer une des sections des langues dites véhiculaires (DE, EN et FR). Ces élèves sans section linguistique (Students Without A Language Section ou SWALS) bénéficient de cours supplémentaires dans leur langue maternelle (L1). Par ailleurs, les étudiants maltais et irlandais peuvent choisir d’étudier le maltais ou l’irlandais comme autre langue nationale (Other National Language ou ONL) et ce, dès la maternelle.

Dans ces écoles, l’étude d’une deuxième langue ou L2 (à choisir entre l’anglais, le français et l’allemand) est obligatoire dès la première primaire. À partir de la troisième primaire, la L2 est également utilisée comme langue d’enseignement pour les cours d’« heures européennes », mais aussi parfois pour les cours d’art, de musique ou d’éducation physique. À partir de la troisième secondaire, les cours d’histoire et de géographie sont dispensés en L2, tout comme le cours d’économie et quelques autres cours à option qui peuvent être choisis à partir de la quatrième année. Dans les deux dernières années du secondaire, en fonction des cours à options choisis, certains élèves suivent un enseignement dispensé jusqu’à 50 % en L2.

Dès la première année secondaire, tous les élèves doivent apprendre une troisième langue vivante (L3). Ils peuvent en outre choisir d’étudier le latin à partir de la troisième secondaire, une quatrième langue (L4) à partir de la quatrième secondaire, et même une cinquième langue s’ils le désirent. Les langues L3 et L4 peuvent en principe être choisies parmi les 24 langues officielles, en tenant compte des possibilités locales. La langue L5 peut-être n’importe quelle langue (par exemple le chinois), pour autant qu’il y ait une demande suffisante. Les langues L3 et L4 peuvent aussi être utilisées pour certains cours à option en fin de secondaire.

Les cours de langues et les cours qui ne se donnent pas dans la langue L1 mélangent des élèves de différentes nationalités et sont pour la plupart dispensés par des enseignants ayant ces langues comme langues maternelle. L’interaction quotidienne à la cour de récréation, dans les couloirs et dans les cafétérias, en particulier entre élèves partageant des cours en L2 et L3, favorise l’apprentissage d’autres langues et la prise de conscience du fait que leur usage n’est pas seulement indispensable mais qu’il va de soi.

En 2019, le Conseil Supérieur des Écoles européennes a approuvé le principe d’une réforme profonde du curriculum linguistique. Elle prévoit notamment un commencement plus précoce pour la troisième langue (L3) : en quatrième primaire plutôt qu’en deuxième secondaire. Elle prévoit également l’élargissement du choix des langues L2 : outre l’allemand, l’anglais et le français, la langue de la ville d’accueil de l’école (si elle n’est aucune de ces trois langues) peut aussi être choisie. Si son approbation est confirmée, cette réforme devrait entrer en vigueur en 2020-2021.

7. Y a-t-il des écoles bilingues à Bruxelles ?

Véritables écoles bilingues. Les écoles européennes sont officiellement multilingues. Mais ne serait-il pas logique que, dans une ville officiellement bilingue, toutes les autres écoles soient des écoles bilingues ? C’est le cas, par exemple, à Barcelone avec le catalan et l’espagnol, à Singapour avec l’anglais et (selon le cas) le chinois, le tamoul ou le malais, ou au Grand-Duché de Luxembourg, où le luxembourgeois, l’allemand et le français sont utilisés comme langues d’instruction, dans des proportions différentes en fonction de l’année scolaire, en plus du luxembourgeois en maternelle. À Bruxelles, la demande pour de telles écoles existe, comme l’atteste le nombre croissant de parents non-néerlandophones qui placent leurs enfants dans des écoles néerlandophones, ainsi que les enquêtes d’opinion qui indiquent qu’une grande majorité des Bruxellois voudrait des écoles bilingues (90% selon le Taalbarometer 2017). En mai 2013, peu après son entrée en fonction comme ministre-président de la Région de Bruxelles-Capitale, Rudi Vervoort a déclaré qu’il était déterminé à « se battre pour des écoles bilingues ». En septembre 2017, à l’initiative du Ministre Guy Vanhengel, une formation d’instituteurs bilingues a été mise en place, grâce à la collaboration de la Haute École Francisco Ferrer et de l’Erasmushogeschool, pour pallier à la pénurie d’instituteurs dotés de bonnes connaissances des deux langues. En avril 2019, les recteurs de l’Université libre de Bruxelles et de la Vrije Universiteit Brussel ont rendu public un projet de création d’écoles secondaires multilingues, où le français, le néerlandais et l’anglais seraient utilisés comme langues d’instruction. Ce projet a reçu un large appui mais n’a pas été retenu dans l’accord de majorité pour la législature 2019-2024 à Bruxelles-Capitale.

Le débat sur le projet des recteurs a cependant permis de clarifier les conditions institutionnelles d’écoles bilingues (voir La création d’écoles bilingues en RBC). Les Communautés flamande et française ont actuellement le monopole de l’enseignement publiquement subventionné à Bruxelles, avec respectivement le néerlandais et le français comme langue unique d’instruction. La législation linguistique de 1963 ne devrait cependant pas exclure la possibilité d’écoles ayant le français et le néerlandais comme langues d’instruction, et plusieurs communes se sont déclarées disposées à constituer les pouvoirs organisateurs de telles écoles. La difficulté principale consiste à doter une instance du pouvoir de réguler et financer cet enseignement. L’Etat fédéral en a le droit mais n’est actuellement pas équipé pour s’en charger ni disposé à en déléguer la compétence à la région bruxelloise. Par ailleurs, il faudra pouvoir relever le défi de recruter et de stabiliser assez d’enseignants avec les qualifications requises pour enseigner les diverses matières en néerlandais.

Immersion dans des écoles francophones. L’école dite « d’immersion » peut être considérée comme une version modeste de l’école bilingue. Depuis 1998, la Communauté française a permis à certaines de ses écoles de devenir des écoles d’immersion. Pour se conformer à la législation linguistique, cet enseignement de certaines matières dans une langue autre que le français est présenté comme une manière d’apprendre cette deuxième langue (dite langue d’immersion), plutôt que comme l’usage d’une véritable seconde langue d’instruction. En 2019-2020, il y avait 185 écoles primaires francophones (dont 20 situées à Bruxelles) qui proposaient un tel enseignement pour le néerlandais ou l’anglais, avec jusqu’à 70% de l’horaire dans la langue d’immersion (voir la liste) . En 2017-2018, il y en avait 128 au niveau secondaire (dont 23 à Bruxelles) (voir la liste). A Bruxelles, l’immersion est toujours en néerlandais en primaire et durant les deux premières années du secondaire. Cette immersion peut, en principe, se poursuivre en anglais les années suivantes, mais l’offre est restée très restreinte jusqu’à présent. L’enseignement dans la deuxième langue varie de 8 à 18 heures par semaine. Malgré la publicité dont elle est l’objet, l’immersion reste un phénomène marginal dans les écoles de la Communauté française.

Immersion dans les écoles néerlandophones . La Communauté néerlandophone est officiellement moins favorable aux écoles d’immersion, en particulier en ce qui concerne Bruxelles et sa périphérie, et n’offre pas d’enseignement en immersion aux niveaux maternel et primaire. La raison avancée est que la plupart des élèves des écoles néerlandophones de la Région bruxelloise n’ont pas le néerlandais comme langue familiale. Par conséquent, pour ces élèves, suivre les cours en néerlandais constitue déjà une forme de submersion. La crainte porte en particulier sur le fait que l’utilisation du français comme deuxième langue d’instruction lorsque la plupart des élèves ont le français comme langue maternelle (ou comme langue de la rue) risque de nuire tellement à l’apprentissage du néerlandais que les élèves n’atteindront jamais le niveau requis en néerlandais pour réussir leurs études secondaires et supérieures. Des études montrent cependant que ceci n’est pas nécessairement le cas. Malgré ces considérations et l’attitude réservée des autorités, quelques écoles bruxelloises ont proposé des cours en immersion pour l’italien, l’espagnol et l’arabe pendant une trentaine d’années et jusqu’en 2011, à l’initiative de l’association Foyer basée à Molenbeek. La formule utilisée permettait aux élèves ayant ces langues maternelles de mieux les apprendre à l’école, mais les autres élèves n’étaient pas impliqués. Quelques écoles continuent à tester l’immersion dans le cadre du projet Stimob (Stimulating Multilingual Education in Brussels), où un certain nombre d’heures supplémentaires (par exemple des heures de répétition en mathématiques) sont données en français.

Pour une percée de l’enseignement en immersion dans l’enseignement néerlandophone, il a fallu attendre la décision du Parlement flamand du 10 juillet 2013, qui a autorisé un enseignement en immersion (sous le nom de Content and Language Integrated Learning ou CLIL) au niveau secondaire tant en Flandre qu’à Bruxelles sous certaines conditions. La langue d’immersion peut être le français, l’anglais ou l’allemand. Le maximum d’heures d’enseignement dans cette langue (hors cours de langue) est fixé à 20%. En 2019-2020, 123 écoles ont déjà introduit un enseignement de ce type, dont 4 à Bruxelles pour le français ou l’anglais (Meertalig Atheneum Woluwe, GO ! Atheneum Etterbeek, Comenius Campus Koekelberg en Atheneum GO for Business in Molenbeek).

8. Y a-t-il des médias multilingues à Bruxelles ?

Audiovisuel. Les chaînes de télévision locales sont BX1 (de 1985 à 2016 Télé Bruxelles) et BRUZZ (de 1993 à 2016 TV-Brussel), diffusées respectivement en français et en néerlandais. Cependant, BRUZZ fonctionne dans une certaine mesure en trois langues. En effet, ses programmes en néerlandais sont sous-titrés en français et en anglais, tandis que les interviews en français ou en anglais sont sous-titrées dans les deux autres langues. Par ailleurs, il existe différentes chaînes de radio bruxelloises en français, en néerlandais et dans d’autres langues (par exemple, arabe, turc, anglais). FMBrussel propose des émissions aussi bien en néerlandais qu’en français. La station radio BXFM a été conçue spécialement pour les « Eurobruxellois » et diffuse des programmes en français, en anglais, en italien et en espagnol.

Presse imprimée. La Capitale est un quotidien populaire en langue française couvrant Bruxelles et le Brabant wallon. Les quotidiens nationaux francophones contiennent pour la plupart des pages dédiées à Bruxelles. L’hebdomadaire néerlandophone bruxellois Bruzz contient un supplément culturel hebdomadaire, ainsi qu’un supplément culturel quadrimestriel pour les enfants de Bruxelles (Kidsgazette), l’un et l’autre publiés en néerlandais, français et anglais.

Presse en ligne. A Bruxelles comme partout ailleurs, la presse écrite et les médias audiovisuels sont peu à peu remplacés en partie par des sites et des blogs, qui sont souvent en deux ou trois langues, voire davantage. En anglais, les principaux sites sont aujourd’hui ceux du Bulletin (jusqu’en 2012 également un hebdomadaire imprimé) et The Brussels Times (également un magazine imprimé bimensuel).